Aujourd'hui j'ai fait euthanasier une chatte, qui avait probablement la Leucose ou le Sida. C'était une jeune chatte de 3 ans, que l'on m'a apportée. Les gens qui l'ont trouvée ne pouvaient pas la garder, comme toujours.
Il y a toujours un obstacle : un appartement, une rue, une allergie, un travail, un mari...
Je l'ai appelée «Maya». Elle était vive, gaie, toujours en action, toujours sur le balcon dehors. Je l'ai faite stériliser, pour qu'elle puisse sortir complètement. A partir de là, elle a commencé à changer. Elle ne voulait plus sortir complètement (derrière le parc des chats), elle préférait le balcon. Elle était «accro» au croquettes de Royal Canin et elle essayait souvent d'ouvrir les boîtes où elles étaient stockées.
Je l'en ai souvent empêché, je lui ai dit qu'elle était une jeune chatte costaud et qu'elle n'avait donc pas besoin de nourriture spéciale pour les chats fragiles. Aujourd'hui, je le regrette beaucoup. Mais il n'y a pas assez de dons et la nourriture pour les chats est déjà très chère, surtout pour 200 chats.
Maya a changé, elle a maigri, d'abord un peu, puis rapidement. Quand j'ai réalisé qu'elle n'avait pas que le coryza mais quelque chose de plus grave, nous lui avons administré tous les traitements possibles. Contre sa diarrhée, pour son foie, contre le coryza, pour la nourrir... mais rien ne fut efficace. Elle est devenue une chatte très maigre, très mal, qui souffrait. L'euthanasie fut le dernier service que je lui ai rendu. Elle me manque déjà beaucoup.
Pendant que j'écris ces lignes, Morlind dort déjà, il est très tard et elle est fatiguée. Ses journées sont très dures et physiquement très lourdes avec toutes les chèvres et chevaux à l'étable. Le nettoyage de l'étable, chaque jour, nous prend des heures. S'ensuit le nettoyage des chambres où vivent les chiens et les chats. Entretemps, il faut nourrir les 15 chevreaux orphelins et soigner les chèvres et les chats malades. Le travail se termine à minuit ou plus tard. Nous luttons souvent contre le sommeil, surtout si nous n'avons pas eu le temps de manger. On court, on court, mais il reste toujours un animal qu'il faut soigner, nourrir, etc... Ce printemps, nous ne voulions pas prendre de chevreaux, mais les éleveurs nous appellent souvent pour nous dire : «Il y a une (ou deux) chèvre(s) qui ne se lève plus».
Quand nous arrivons chez l'éleveur, il nous montre la chèvre, toujours squelettique à cause du manque constant de nourriture, «qui ne se lève plus», après une fausse couche, une naissance ou simplement par épuisement.
On la porte dans la voiture en évitant de marcher sur les cadavres de chèvres «qui sont déjà raides» (il laisse les chèvres là, sans jamais leur apporter à manger où à boire, beaucoup meurent donc de déshydratation).
Quand nous arrivons à la maison avec les chèvres, on les laisse boire, boire, boire. Parfois une perfusion peut encore les sauver. Parfois plus rien ne peut les sauver.
Parfois elles sont même trop faibles pour tenir leur tête. Elles ont brûlé jusqu'à leur dernier muscle.
Ces squelettes ont un, deux, trois ou quatre ans. Elles ont donné naissance une, deux, quatre ou cinq fois à des chevreaux, mais jamais elles n'ont pu garder leurs petits plus de quelques heures. Après, l'éleveur est venu les chercher, les séparer. Les mères pleurent, les bébés pleurent. Certaines mères qui connaissent cela essayent désespérément de se cacher avec leur bébé. Mais en vain.
J'ai acheté la dernière fois une chèvre chez l'éleveur, qui était encore «en bon état», mais tellement terrifiée. Elle essayait de cacher son nouveau-né, de le garder avec elle.
J'ai pensé à la rafle contre les juifs.
J'ai payé cher pour sauver cette mère et son enfant de cet enfer. J'essaye de ne pas penser aux autres qui sont encore là, qui naissent encore et qui meurent lentement parce qu'il y a un problème et que le vétérinaire est trop cher.
Les mères qui sont si dévouées à leurs petits les voient partir en criant. Les bébés sont enlevés et nourris quelques jours, avant d'être entassés dans des camions pour l'engraissement et l'abattoir. Je vois les nôtres, que nous avons achetés pour les sauver. Ils sautent, jouent et cherchent les chèvres malades, pour se blottir contre elles, pour se sentir protégés et aimés.
Tout ça, ce n'est pas quelque chose qui interpelle la DSV. Pour eux, tout est en règle, les chèvres sont identifiées.
La malnutrition n'intéresse personne et les chèvres paralysées par des coups de pied sont des «cas isolés». Nous avons eu 5 de ces «cas isolés» à l'étable cet hiver et 5 chèvres sont déjà parties avec l'équarrisseur. Le vétérinaire parle de grave maltraitance mais ne veut pas se mettre à dos ses clients.
Par ailleurs, ce sont des chèvres qui sont nées pour être abattues ou pour donner du lait.
200 chevreaux sont partis avec le camion la semaine dernière, en provenance d'un seul élevage, près de chez nous. Nous en avons sauvé 15. On aurait aimé en sauver davantage, mais le lait coûte très cher et plus tard le foin aussi. Et il y a aussi la charge de travail. Il faut rester raisonnable.
Mais face à toute cette horreur, j'avoue avoir du mal.
Verena Fiegl
Nous comptons sur votre soutien pour continuer à libérer des chèvres et des chevreaux et pour les nourrir.
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